La France appelle Brunei à renoncer à instaurer la peine de mort contre l’homosexualité et l’adultère
(190223) -- BANDAR SERI BEGAWAN, Feb. 23, 2019 (Xinhua) -- Brunei's Sultan Haji Hassanal Bolkiah salutes to the parading contingents during the 35th National Day celebration in Bandar Seri Begawan, capital of Brunei, Feb. 23, 2019. Brunei held massive parade and performances in the capital on Saturday to mark its 35th National Day. (Xinhua/Melvin Jong) - Melvin Jong -//CHINENOUVELLE_chine014191/1902241351/Credit:CHINE NOUVELLE/SIPA/1902241355 Hassanal Bolkiah (ici, le 23 février 2019) dirige d’une main de fer le sultanat de Brunei. (CHINE NOUVELLE/SIPA / CHINE NOUVELLE/SIPA)
La révision de la loi doit entrer en vigueur mercredi dans ce riche petit Etat pétrolier d’Asie du Sud-Est. Lundi, l’ONU avait déjà dénoncé des « peines cruelles et inhumaines ».
Par L'Obs avec AFP
Publié le 02 avril 2019 à 13h40
La France a appelé, mardi 2 avril, le sultanat de Brunei à renoncer à une nouvelle législation qui va instaurer la peine de mort en cas d’homosexualité ou d’adultère en invoquant la loi islamique. « Le Brunei a annoncé l’entrée en vigueur d’un nouveau code pénal le 3 avril 2019, qui prévoit des châtiments corporels et la peine de mort pour des incriminations notamment d’homosexualité, d’apostasie, de blasphème et d’adultère. [...] La France appelle le Brunei à renoncer à ce projet et à maintenir son moratoire de fait des exécutions capitales depuis 1957 », a déclaré la porte-parole de la diplomatie française dans un communiqué.
Lundi, l’ONU avait déjà dénoncé les « peines cruelles et inhumaines » prévues par la nouvelle législation du pays. « J’en appelle au gouvernement pour qu’il mette fin à l’entrée en vigueur de ce nouveau code pénal draconien qui, s’il était appliqué, marquerait un sérieux recul pour la protection des droits humains » au Brunei, avait déclaré la haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, dans un communiqué.
La révision de la loi, qui doit entrer en vigueur le 3 avril dans ce riche petit Etat pétrolier d’Asie du Sud-Est, « consacrerait dans la législation des peines cruelles et inhumaines qui violent gravement le droit international relatif aux droits humains – dont la mort par lapidation ».
Peine de mort, flagellation, amputation
Pour marquer leur protestation, l’acteur américain George Clooney et le chanteur britannique Elton John ont appelé au boycott des neuf hôtels de luxe liés au sultan de Brunei et gérés par Dorchester Collection – lui-même propriété de Dorchester Group basé à Londres –, parmi lesquels The Dorchester et 45 Park Lane dans la capitale britannique, le Bel-Air à Los Angeles, l’Eden à Rome ou encore le Meurice et le Plaza Athénée à Paris.
Interrogé par l’AFP à Rome et à Londres, Dorchester Collection a affirmé dans un communiqué « promouvoir la qualité, le respect et l’intégrité dans tous les domaines de [ses] activités, et attacher une grande importance aux personnes et à la diversité culturelle de ses clients et employés. L’inclusion et la diversité demeurent des convictions fondamentales et nous ne tolérons aucune forme de discrimination ». A Paris, une porte-parole n’a pas « souhaité commenter les appels au boycott ».
Selon l’ONU, la nouvelle législation de Brunei prévoit la peine de mort pour de multiples infractions, telles que le viol, l’adultère, les relations sexuelles extraconjugales pour les musulmans, l’insulte ou la diffamation du prophète Mahomet. Elle introduit également la flagellation publique comme punition pour l’avortement et l’amputation pour le vol. Elle criminalise aussi le fait d’exposer les enfants musulmans aux croyances et pratiques de toute religion autre que l’islam. L’homosexualité, déjà illégale, sera désormais considérée comme un crime.
La peine de mort est déjà inscrite dans la législation du Brunei, mais la dernière exécution a eu lieu en 1957, selon l’ONU.
Les lois internationales ont des restrictions strictes
« J’exhorte le Brunei à maintenir son moratoire de facto sur l’application de la peine capitale », a insisté Michelle Bachelet. La haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme a souligné que les lois et normes internationales relatives aux droits humains imposent des restrictions strictes à la peine de mort, qui ne peut être appliquée qu’en cas de meurtre ou d’homicide volontaire, après un procès respectant pleinement les garanties d’une procédure régulière :
« En réalité, aucun pouvoir judiciaire dans le monde ne peut prétendre être exempt d’erreurs, et les faits montrent que la peine de mort est appliquée de manière disproportionnée à des personnes qui sont déjà vulnérables, avec un risque élevé d’erreurs judiciaires. »
La monarchie de Brunei (430.000 habitants) est dirigée d’une main de fer par le sultan Hassanal Bolkiah depuis 1967. Elle a annoncé en 2013 l’introduction progressive de la charia, mais la mise en application de ces mesures avait été retardée pour des questions pratiques et face à l’opposition des défenseurs des droits humains.