une Bible et tant de religions
La Genèse, premier livre de la Bible, explique l’origine des religions. Au commencement, l’homme, chef-d’œuvre de la création, n’avait pas besoin de pratiquer une religion quelconque. Il vivait dans une harmonieuse relation avec Dieu. Il connaissait Dieu avec lequel il parlait personnellement. Cette communion a été brisée par le péché, avec, comme conséquence funeste, la mort physique et spirituelle de l’homme. La religion des premiers hommes était monothéiste. Pour pouvoir s’approcher du Dieu unique, il fallait présenter le sacrifice d’un animal. « Sans effusion de sang, il n’y a pas de pardon {19}. » Avec le temps, l’homme s’est éloigné de plus en plus de Dieu, est devenu polythéiste et s’est tourné vers la magie, les idoles, etc. C’est dans ce contexte que Dieu s’est révélé à Abraham.
Question : les juifs se basent sur la Bible
Vrai + Faux. La première partie de la Bible, l’Ancien Testament, nous a été communiquée par le peuple juif. Voici les grandes étapes de son histoire : Dieu fait alliance avec Abraham, le Père des croyants, et lui promet de bénir toutes les familles de la terre à travers sa postérité. Moïse reçoit la révélation de la loi et rédige les cinq premiers livres de la Bible, la Torah ou Pentateuque. Pendant près de six siècles, Dieu envoie des prophètes pour avertir le peuple d’Israël, souvent désobéissant, avec la promesse de la venue d’un grand libérateur, le Messie. Les juifs ont classé leurs écrits sacrés en trois groupes : la loi, les prophètes et les écrits. Plus d’un siècle avant la naissance de Jésus, cet ensemble existait déjà. Il constituait ce que Jésus et les disciples considéraient comme leur « Bible ».
Au iie siècle avant J.-C., les Grecs ont voulu effacer les caractères distinctifs des peuples qu’ils dominaient, dont les Juifs. D’où l’apparition de plusieurs groupes ou sectes juifs dont l’influence était considérable. Durant cette période, les rabbins ont ajouté aux écrits bibliques un enseignement ayant pour eux la même autorité que ceux-ci, la Tradition, ainsi que des livres apocryphes.
Au premier siècle, de nombreux juifs ont reconnu Jésus de Nazareth comme leur Messie. Les autres se sont attachés à la Tradition. Entre le ive et le vie siècle, le Talmud a vu le jour. C’est une vaste compilation des traditions juives relatives à l’Ancien Testament. Il traite de tous les aspects de la vie civile, morale, philosophique, juridique, médicale et religieuse du judaïsme. Les juifs sont certes les dépositaires de la première partie de la Bible mais leur Tradition est venue contredire ou annuler la Parole de Dieu. Ce que Jésus a reproché aux pharisiens : « Vous annulez ainsi la Parole de Dieu au profit de votre tradition {19}. »
Question : les catholiques se basent sur la Bible
Vrai + Faux. S’ils reconnaissent la Bible, l’Ancien et le Nouveau Testament, comme Parole de Dieu, les catholiques ajoutent cependant à celle-ci les livres apocryphes qui n’ont été reconnus comme canoniques ni par les juifs ni par les premiers chrétiens. Les catholiques accordent aux livres apocryphes la même autorité qu’aux livres inspirés {20}. Une autre particularité du catholicisme concerne l’interprétation des textes : celle-ci n’est acceptée que si elle émane de l’Église catholique, explicitée par les décisions des conciles généraux et les déclarations du magistère {21} et par les travaux des premiers Pères de l’Église. Enfin, le catholique a besoin d’une tradition pour l’enseignement et la pratique. Cette tradition a la même autorité que la Bible.
Question : les protestants se basent sur la Bible
Vrai. Ils sont connus pour leur attachement à la Bible, Ancien et Nouveau Testament. Les réformateurs ont fondé leur doctrine sur la Bible, sur le témoignage qu’elle rend d’elle-même. Elle est seule suffisante en matière de foi et de conduite et ne contient pas de livres apocryphes. Il n’y a pas de tradition. Les protestants ont adopté le même canon que les juifs pour l’Ancien Testament. Pourtant, certains protestants refusent le caractère absolu de l’autorité de la Bible. Ils ont ramené la Parole de Dieu au niveau d’une religion de la raison. Pour d’autres, la vie chrétienne ne doit être basée que sur l’expérience et le sentiment religieux.
Question : les musulmans se basent sur la Bible
Vrai + Faux. Dans le credo musulman, il est mentionné, entre autres, que tout musulman doit croire dans les livres de Dieu, Torah, Psaumes, Évangiles et dans le Coran. Le Coran lui-même, livre saint des musulmans, fait référence à la Bible plus d’une dizaine de fois.
Pourtant les musulmans ne la lisent pas. Ils pensent qu’ils ont l’essentiel de la Bible dans le Coran et que celui-ci résume et remplace la Bible qui a été falsifiée ou modifiée par les juifs et les chrétiens.
Si un juif, un catholique, un protestant ou un musulman a l’occasion de lire la Bible avec un cœur ouvert, il pourra découvrir l’amour de Dieu, la certitude du pardon et de la vie éternelle.
Question : c’est à cause de la Bible que juifs et musulmans battent en Palestine
Faux. L’origine du conflit entre juifs et musulmans n’est pas récente. Elle remonte aux débuts de l’islam. Et même à l’époque d’Abraham, qui a eu deux fils : Ismaël, enfanté par la servante Agar, et Isaac, enfanté par Sarah, l’épouse d’Abraham. À la suite de ce drame familial, Abraham chasse, à contrecœurs, Agar et son fils Ismaël. Celui-ci reçoit une promesse de bénédiction : de lui sortira une grande nation. Isaac obtient, lui aussi, une promesse. En lui, toutes les familles de la terre seront bénies. Le peuple juif est issu d’Isaac et le peuple arabe d’Ismaël.
L’islam est apparu au viie siècle après Jésus-Christ. On distingue deux périodes dans la vie et la prédication de son prophète Mohammed. Pendant la première (610-622), Mohammed est très proche des juifs (plusieurs oasis d’Arabie sont habitées par des juifs qui y ont établi des colonies agricoles). Il prêche l’unicité de Dieu, la résurrection après la mort et le jugement dernier. Les musulmans prient en direction de Jérusalem et jeûnent le jour de la fête juive de l’Expiation. 622, pour fuir la persécution, Mohammed et les siens se réfugient à Yathrib (devenue Médine). Mohammed, de prédicateur à La Mecque, devient homme d’état et chef militaire. La période médinoise marque un tournant dans les relations de Mohammed avec les juifs. Il leur demande de le reconnaître comme le prophète dont parlait Moïse et de se convertir ainsi à l’islam. Les juifs de Médine refusent et critiquent Mohammed pour les libertés qu’il prend avec le texte biblique. C’est la rupture avec les juifs. Les musulmans cessent de se tourner vers Jérusalem pour prier. Ils se tournent désormais vers la Kaaba, temple de La Mecque. Le jeûne musulman est fixé à la période de Ramadan. Mohammed a besoin de ressources pour subvenir aux besoins de sa nouvelle communauté et pour imposer sa vision à toute l’Arabie. Il expulse deux tribus juives de Médine et confisque leurs biens. Après la guerre des Fossés en 627, il élimine la dernière tribu. Durant cette période, il y a de plus en plus de révélations coraniques anti-juives. Dans le Coran, le peuple musulman remplace le peuple juif comme peuple élu de Dieu.
En 638, la Palestine passe aux mains des musulmans. Elle est arabisée et devient l’une des principales provinces du monde musulman. La population chrétienne locale se convertit progressivement à l’islam.
À la fin du xixe siècle, la population de la Palestine est composée d’une majorité de musulmans, d’une importante minorité de chrétiens et d’un petit nombre de juifs. De nombreux juifs européens viennent s’installer en Palestine. Cette immigration massive résulte des persécutions dans certains pays d’Europe et de l’idéologie sioniste qui prône l’établissement d’un foyer national juif.
Au xxe siècle, la Palestine passe sous le mandat des Britanniques qui envisagent l’établissement d’un foyer national juif. Certains Arabes considèrent ce foyer comme une menace. Des incidents sanglants ont lieu à Jérusalem, Haïfa et Jaffa. Le plan de partage de la Palestine en deux états indépendants, l’un juif, l’autre arabe, adopté par les Nations Unies en 1947, aboutit à la proclamation de l’État d’Israël, le 14 mai 1948.
Il apparaît que les problèmes entre les deux communautés, tout en ayant leur origine dans un drame familial, ont des causes multiples : économiques, politiques et religieuses. Ils proviennent surtout de ce que les uns et les autres n’ont pas accepté le plan de Dieu.
Le judaïsme n’a pas reconnu en Jésus le Messie, le prince de la paix dont parlait le prophète Ésaïe {22}. L’islam n’accepte pas la mort de Jésus comme sacrifice pour le rachat des péchés. Ni les uns ni les autres ne peuvent donc connaître la paix alors que les promesses de bénédiction de Dieu sont pour chacun d’eux et qu’elles se sont accomplies en Jésus-Christ.
antoine gilardi
Pasteur, enseignant à l’Institut Biblique de Genève et missionnaire du Ministère Évangélique parmi les Nations Arabophones.
{18} Lettre aux Hébreux 9:22. Voir "#Heb 9:22"
{19} Évangile de Matthieu 15:6. Voir "#Mt 15:6"
{20} Les livres apocryphes ont été formellement ajoutés à la Bible à l’occasion du Concile de Trente en 1540.
{21} Le Nouveau Catéchisme Catholique, Éditions Mame/Plon.
{22} Prophète Ésaïe 9:5 et 53:8. Voir "#Esa 9:5; Esa 53:8"