Quand j’étais adolescent, à cet âge romantique où je pouvais passer des demi-journée entière à courir les champs et les bois, plongé dans cette nature que chantait Lamartine :
« Oui, la nature est là qui t’invite et qui t’aime
« Plonge-toi dans son sein qui t’accueille toujours
j’entendais parler les arbres. Etait-ce les arbres qui me parlaient ou bien le vent qui les caressait avec amour ou les secouait avec rage ? Peu importe, ils me disaient quelque chose, quelque chose qui ne pouvait pas se traduire dans les mots du langage courant mais pourtant, bien plus signifiant que toute parole claire. C’était des paroles apaisantes quand il faisait s’incliner doucement les souples peupliers, des paroles de colère et de révolte quand il secouait rageusement la ramure des chênes.
A cette époque, je pensais, cela allait de soi, qu’il en était ainsi pour tout le monde, je me contentais de jouir, sans me poser de questions, de cet univers magique ; et je fus surpris quand, en parlant avec d’autres, j’appris qu’ils n’entendaient pas, eux, parler les arbres, ou le vent dans les arbres.
Et puis, quand j’ai connu celle qui allait devenir ma femme, nous aimions, tous les deux, courir les champs et les bois, et j’appris qu’elle aussi, entendait parler les arbres ; ce qui n’a pas peu contribuer à nous unir dans cette connivence secrète qui est celle des amoureux et des poètes.
Ensuite, les vicissitudes et l’agitation de la vie professionnelle ont quelque peu éclipsé ces épisodes de notre période romantique.
Maintenant, avec l’âge, et le loisir que procure la situation de retraité, je me remets à écouter parler les arbres, ou le vent dans les arbres.
L’Esprit, c’est du vent.
Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit; mais tu ne sais d'où il vient, ni où il va. Il en est ainsi de tout homme qui est né de l'Esprit.
Nicodème, Tu es le docteur d'Israël, et tu ne sais pas ces choses!
(Jean 3 : 9-10)
On peut se représenter dieu le Père ; même si on n’en fait pas forcément des tableaux, on se le représente comme un père de famille, tyrannique ou affectueux : portrait fidèle de cet « Etre » qu’on nomme « Dieu », ou bien pure imagination ?
Il n’y a, par contre, aucun problème à se représenter Jésus : un juif pieux du Ier siècle « après J-C ».
Mais « le Saint-Esprit » ? comment se le représenter ? une colombe ? Pourquoi pas un étourneau, un épervier ou une mouette ?
L’Esprit, c’est du vent. Est-ce qu’on peut peindre le vent dans un tableau ? Est-ce qu’il viendrait à l’esprit de penser que le vent, celui qui me parle en murmurant dans les arbres, c’est une personne ?
La « Trinité » : Père, fils et « Saint-Esprit » c’est une simple représentation, une image, très riche de sens, en fait : l’image de la famille humaine où des personnes différentes sont unies dans l’amour. Oui, la « trinité », ça nous dit quelque chose, de même que le vent qui murmure dans les arbres ; ça nous dit quelque chose, à condition de ne pas figer cette « parole » dans un dogme rigide.